Editorial du professeur Victor IZRAEL

Pr VICTOR IZRAEL full
Professeur Victor Izrael, Président-fondateur de l’APREC

Moins de dix ans après que le Président Kennedy eût promis aux Américains d’aller sur la lune,  le pari était gagné. Vingt-cinq ans après que le Président Nixon eût lancé en 1971 une véritable déclaration de guerre contre le cancer (National Cancer Act), force fut de reconnaître que le pari était perdu. L’ennemi n’avait pas pu être vaincu malgré les immenses moyens mis en œuvre, car les technologies de l’époque n’avaient pas permis de l’identifier avec précision au sein de la minuscule cellule vivante.

En France, la lutte contre le cancer s’est longtemps heurtée au désengagement des pouvoirs publics et à la résignation ambiante. Le premier projet réellement collectif a été le Plan Cancer lancé en 2003, qui a notamment voulu impulser un nouvel élan à la recherche. Mais l’enthousiasme s’est vite enlisé dans les enchevêtrements administratifs et l’absence de moyens.

Et pourtant, l’heure est venue pour la recherche contre le cancer d’un immense bond en avant, prélude à une véritable révolution thérapeutique.

Nous savons en effet aujourd’hui pénétrer dans l’intimité même de la cellule vivante, qui est l’unité de vie. Un être humain est constitué de la juxtaposition de millions de milliards de ces cellules. Chacune d’entre elles, dans un diamètre qui n’excède pas quelques millionièmes de mètre, abrite une prodigieuse organisation. Nous y reconnaissons aujourd’hui les centres de commande, les voies de signalisation, les circuits d’exécution, les mécanismes d’auto-réparation, les mécanismes d’auto-contrôle de la division cellulaire. Et nous y avons décrypté les rouages qui, lorsqu’ils sont grippés, font qu’une cellule jusque-là normale devient cancéreuse. Elle perd alors tout auto-contrôle,  et se divise sans fin, donnant naissance à d’innombrables cellules-filles tout aussi indisciplinées, qui s’accumulent localement pour constituer la tumeur primitive et migrent à distance pour y implanter des métastases.

Ainsi, nous sommes aujourd’hui en situation de pouvoir fabriquer des médicaments qui sont de véritables « fusées à tête chercheuse », capables de reconnaître le rouage grippé que l’on vise électivement, et le détruire en même temps que la cellule cancéreuse qui le porte. Ces médicaments, qu’on appelle « molécules ciblées », permettent des traitements de plus en plus spécifiques, qui se fondent sur l’analyse des caractéristiques biologiques et génétiques propres à chaque tumeur. La voie est grande ouverte vers des traitements de plus en plus personnalisés « à la carte » : perspective exaltante, même si elle porte en germe le risque de faire surgir des dilemmes économiques et éthiques majeurs.

Plus de la moitié de la cinquantaine de médicaments  qui sont aujourd’hui utilisés  contre le cancer sont déjà des molécules ciblées. Et entre 800 et 900 nouvelles molécules ciblées sont en voie de développement ! Mais il faut aller vite, très vite. Pendant que nos thérapeutes réussissent de mieux en mieux à « chroniciser » la maladie, c’est-à-dire à faire bénéficier le patient de rémissions successives qui sont autant de sursis, nos chercheurs s’investissent à fond dans la mise au point de molécules ciblées qui seules peuvent être salvatrices lorsque l’arsenal thérapeutique classique est épuisé.

En plus de 30 ans d’existence, l’APREC a largement participé aux progrès accomplis. Malgré sa taille relativement modeste, elle a su décupler son action grâce au dévouement sans faille de ses chercheurs, à des synergies multidisciplinaires, et à des partenariats multiples nationaux et internationaux. Malgré ses succès, elle a su rester  un organisme vertueux et indépendant.

Aujourd’hui, l’APREC s’apprête à affronter les défis nouveaux. La prochaine étape prévue est l’installation dans notre nouveau bâtiment de recherche d’un laboratoire de pharmacologie pré-clinique, qui permettra d’accélérer encore le circuit translationnel entre le développement de la molécule et sa disponibilité au patient. Des financements importants sont nécessaires pour équiper ce laboratoire et recruter de nouveaux chercheurs. Or l’APREC, en tant qu’association loi 1901 à but non lucratif, ne bénéficie d’aucun financement public. C’est pourquoi nous faisons appel à votre soutien.

Pour intensifier son combat  contre le cancer à travers des programmes de recherche encore plus ambitieux, l’APREC a besoin de votre générosité. Avec vous, l’équipe de l’APREC continuera à s’engager corps et âme pour que se lève enfin ce jour où nous vaincrons le cancer.